Piézographie sur papier coton
chaque élément 100 x 155 cm
2022
5 ex. + 3 E.A.

Quand je danse ou marche, je me sens totalement puissante et vivante, sans compter le temps qui passe.
Une vibration au plus profond, une ombre danse sur une mer déchaînée, expérience physique, le poids de mon corps enfonce la terre. Un bruit sourd comme un éclair qui éclate en larmes.

"Dans le poème de Paul Celan qui ouvre "Passer, quoi qu'il en coûte" il y a l'image d'un "homme", d'un être humain quels que soient sa provenance et le lieu de sa fuite: c'est à lui que s'adresse, de la façon la plus simple et la plus hospitalière qui soit, une invitation à passer. Qu'est-ce ici que passer ? C'est faire le pas. C'est avoir la puissance de marcher, de cheminer, d'aller vers, de suivre ses propres "lignes d'erre" ou de désir et, pour cela, de franchir les lignes de pouvoir."

C'est donc traverser : traverser la mer, traverser la frontière. Élever un enfant, par exemple, qu'est-ce d'autre sinon savoir l'inviter à passer, à outrepasser la limite de son propre présent parental ? L'inviter à donner lui-même forme à son désir ? L'hospitalité, ce n'est donc peut-être rien d'autre que l’accueil ou l'invite à traverser librement le temps, là où une "politique des survivances" saurait se faire, comme chez Pasolini, par exemple, politique du désir d'émancipation. L'invitation de Paul Celan "Passez...passez...", peut alors être lue comme l'invitation hospitalière faite à autrui de résister ou de persister dans le geste même du passage."

Georges Didi-Huberman dans "Pour commencer encore"